Lee se tenait près de la porte. Elle glissait ses mains tremblantes dans les poches de son blouson en cuir. Sa tête tournait. Ça devenait presque une habitude. C’était lassant et franchement ça l’agaçait plus qu’autre chose. La demoiselle avait eut son premier rendez-vous de suivi quelques jours auparavant. Sa meilleure amie Sage l’avait accompagné. C’était la seule solution que la belle avait trouvé pour ne pas se débiner. La question de la chimio avait été abordée. La demoiselle avait reporté la décision à plus tard. Elle avait déjà accepté de prendre les médicaments c’était déjà bien non ? Un petit pas en avant, dans la bonne direction. Lee passa sa main dans sa queue de cheval. Elle délivrait sa chevelue d’un coup sec avant d’entrer dans le Starbuck. Il était rare que la demoiselle ne paie sa boisson. Habituellement, elle se glissait dans la queue près du barista. Elle attrapait la première boisson qui n’était pas gardée. Et cette fois-ci ne fit pas exception à la règle. Son sourire sur les lèvres, la demoiselle sortait du café. À peine la rouquine avait-elle fait un pas dehors qu’on l’attrapait par l’épaule. Ni une ni deux dans un réflexe abrupte son poing partait. Il ne fallait jamais surprendre une ex-taularde.  « C'est MA boisson que vous... Lee?! », S’étonnait sa cousine, Joe. Un léger rire s’échappait de ses lèvres. Elle lui tendit le gobelet encore brûlant et intact. Ça sentait le chocolat de toute façon. Et Lee n’aimait pas le chocolat. « Désolée. », lâchait la petite rouquine en affichant un léger sourire. Lee poussait un juron. Une grimace sur le visage, ses yeux roulaient vers le ciel. « Bordel, maintenant il faut que je me retrouve une autre boisson. », pestait la rousse. Elle jetait un œil vers la porte d’entrée qui était à moins d’un mètre puis à sa cousine. « Je n’ai aucun moyen de paiement sur moi en plus… Bordel de merdre, c’est bien ma chance légendaire ça encore. » Un autre râle qui s’échappait de ses lèvres. Le froid était bien présent, saisissant ses os. Brûlant son visage rosé. Un autre soupire. « Pour la peine, tu vas m’accompagner. Et tu me connais je n’accepte pas non comme réponse. », décrétait Lee.  Tyran un jour. Tyran toujours.

Lee était incandescente. Lee ne s’arrêtait jamais pour réfléchir ou penser une seconde. Lee vivait dans le maintenant. Lee ne prenait pas de gants, ni de secondes pour penser avant d’agir. « Comment ça, te trouver une autre boisson? » , lâchait sa cousine. La belle devait être incrédule. Il fallait dire que Lee était un sacré bout de femmes. Un bout de femmes aux morales douteuses qui suivaient uniquement ses propres lois. Des lois qui consistaient à flouter quelques lignes. Lee expliquait donc qu’elle n’avait pris aucun argent. Pas étonnant quand on n’en a pas vraiment les moyens. Le peu de ses économies provenant des recettes du pub sont sur son compte. « Ca pue l'excuse à la con ça, Lee... tu vas te faire choper ma fille! » , commentait Joe. Un sourire amusé naissait au coin de ses lèvres. C’était presque lui lancer un défi. La jeune femme avait volé bien plus qu’un simple café. Et ce n’était pas son premier rodéo.  Ça lui semblait bien trop futile pour échouer. Elle l’entrainait avec elle en attestant qu’elle n’avait pas le choix. « T'accompagner? Non, mais t'es suicidaire ma pauvre! Tu connais ma discrétion légendaire... » Joe marquait un point. Elle savait que sa cousine n’était pas vraiment très discrète. Lee l’entrainait tout de même à l’intérieur. Elle avait une idée derrière la tête. C'était un détail facile à régler.  « Lee, non! Lee, c'est pas une bonne idée du tout! » , tentait-elle de la raisonner. Lee levait les yeux au ciel agacé. On croirait entendre sa sœur Lauren. Ce n’était pas si étonnant que les deux jeunes femmes s’entendent si bien. « Shhhshh. Va t’asseoir à une table là-bas et bois ton café tranquillement. Je serais là dans une minute.  » , lui dit-elle en lâchant sa main. Lee s’éloignait de sa cousine. Elle défit un bouton de son haut et ébouriffait ses cheveux légèrement. Ce ne serait pas la première fois qu’un homme – ou une femme – se faisait avoir par ses manigances. Un sourire au coin des lèvres, elle s’approchait du comptoir. Elle fit mine d’observer le menu quelques instants. Son regard se posant sur le barista puis sur le panneau à plusieurs reprises. Son attention ne tardait pas à se poser sur ses courbes généreuses et son regard émeraude. Ses doigts glissèrent sur ses lèvres quelques secondes, les effleurant feintant l’indécision. Sa main  glissait dans son cou avant de retomber contre sa hanche. Il s’approchait, lui demandant si elle avait besoin d’aide. Elle se mordillait la lèvre inférieure. Ses joues s’empourprèrent. Lee aurait très certainement pu avoir une carrière d’actrice. Elle avait joué ce jeu si souvent qu’il était une habitude. Oh mince alors elle avait oublié son porte monnaie. Elle était gênée et embarrassée. Il finit par lui offrir sa boisson inscrivant son numéro dessus. La jeune femme lui fit un clin d’œil en se mordillant la lèvre une deuxième fois. Bien sûr qu’elle l’appellerait lui assurait-elle.  Une fois son manège terminé, la rouquine se détournait du jeune homme se déhanchant vers la table de sa cousine. La belle s’assit son latté aromatisé à la noisette brûlant entre les mains et un sourire victorieux sur les lèvres. « Tu devrais te détendre un petit peu, Joe. Il est bon ton chocolat chaud au moins ? Tu veux que j’aille te chercher du sucre ? »

« Non, merci. Comme d’habitude, c’est largement assez sucré ! Et je suis parfaitement détendue… » , l’informait Joe. Lee hochait la tête, silencieuse. Son sourire avait disparu presque aussitôt qu’il était arrivé. C’était une chose qui se produisait trop souvent chez Lee. Il lui semblait qu’elle oubliait trop souvent de sourire. Il lui était impossible de se souvenir de ses sourires qui étaient toujours trop fugaces. Ses mains sur le gobelet encore brûlant, Lee laissait la chaleur la réchauffer doucement. Ses pensées s’escaladaient comme bien souvent. Son esprit semblait toujours pencher d’un côté plus que de l’autre. Il avait bien trop de facilité à se laisser noircir plutôt que de laisser la lumière entrer. « En tout cas, je vois que tu as changé de manière de faire… tu séduis maintenant. Tu as passé un cap dans ta cleptomanie. » , observait sa cousine. Un sourire amusé se dessinait sur ses lèvres. Cleptomane ? Lee ? Non, ce n’était définitivement pas ainsi que la rousse décrirait ses mauvaises habitudes. Pour elle, c’était bien plus un passe-temps plutôt qu’une nécessité. Enfin, ça lui avait permit bien des fois de vivre décemment avec ses frères et sa sœur.  C’était un moyen pour arriver à une fin. Lee l’avait fait sûrement bien trop souvent pour y voir le mal. « Ça a toujours fait parti de mes techniques. J’ai plus d’un tour dans mon sac. Cleptomanie, c’est un si vilain mot. Je préfère le terme d’emprunt ou de juste retour des choses. Combien de fois nous faisons nous voler par l’état ? C’est un simple retour des choses. » , s’expliquait la demoiselle en croisant les bras sur sa poitrine délaissant son café. Joe pris une gorgée de sa boisson. Lee restait un instant ainsi perdue dans ses pensées. Elle pouvait revoir tous ses choix passés, toutes ses fois où elle avait repris ce qui aurait du lui appartenir, défiler dans son esprit. Un film qui décantait toutes ses actions, ses choix qui avaient créé une succession de conséquences. Son temps en prison, la mort de son mari, sa dispute avec son ainé… Toutes ces choses qui n’avaient jamais cessé de marquer son esprit. « Quand je te regarde, j’ai l’impression que nos conneries, c’était juste hier, Lee. » , commentait la brunette. Pourtant, ce n’était pas le cas. Et aujourd’hui alors qu’elle se tenait devant elle, Lee pouvait voir combien sa cousine avait changé. Et le plus déroutant était combien Lee, elle-même avait changé. Elle ne volait pratiquement plus. La rousse passait bien moins de temps chez elle ou seule. Sa froideur était sûrement moins marquée qu’autrefois également. Une empathie nouvelle s’était emparée de son être. Rencontrer la possibilité d’une mort prochaine y était sûrement pour quelque chose. Sa main s’approchait pour frôler la sienne un instant. Une lueur d’inquiétude brûlait dans ses yeux alors que sa boisson continuait de refroidir. Elle aussi bientôt, elle serait froide de nouveau. Froide, vide et inanimée. « Et pourtant, tellement de choses se sont passées depuis... D’ailleurs, qu’est-ce que j’ai manqué ? »